Du noir sur les mains

[Anamaya]

C'était un mort.

Une mort, c'était rare. Non, exceptionnel. Un mort pour de vrai, pour toujours, à jamais. Il n'allait pas revenir, la donneuse ne le renverrai pas. C'était pour nous autre ça... Mais pas pour eux.
Curieux.

Aussi rien n'aurait pu empêcher la prêtresse d'aller voir par chez les nomades ce qui avait bien pu se passer. Le corps était encore là. N'avait-on tellement pas l'habitude d'avoir des morts mort, qu'on ne savait plus quoi faire d'une dépouille? Une enquête en cours et qui... n'avance pas. On l'invita à se mêler de cette histoire, et elle ne se fit pas prier.
Un mort, un vrai ! Depuis le temps qu'elle espérait en rencontrer un !

Quelques échanges lui apprirent qu'il y avait un lien avec Reebom. Cela faisait bien longtemps qu'elle n'avait plus entendu parler de celui-là. Le bras de Guix lui revint en mémoire, la corruption qui rampait sur lui, cherchant à s'emparer de ce qui pouvait rester des lambeaux de son âme.

Et une vague de honte, liée au secret qu'elle détenait dans un coffre, à l'abri. Reebom. Et un livre.
Son sang se glaça. Un livre. Un livre sombre.

Sans vraiment s'en rendre compte, elle acceptait d'aider l'ami du malheureux à enquêter, se mit à arpenter les terres et le désert, trouver un autre cadavre et confondre le criminel... Mais tout cela l'indifférait. Elle ne pensait qu'à ce livre.

A l'abri, dans la cache de l'homme, elle en ouvrit le coffre. Elle fixa quelques instants l'objet maudit. Il ressemblait beaucoup à celui qu'elle avait récupéré, des années plus tôt sur les disciples de Reebom. Mais l'aura malsaine qui s'en dégageait lorsqu'elle l'effleura n'était pas la même. Peut être se complétaient – ils ?

On lui avait demandé de détruire le livre. Elle fixa le puit près d'elle, attrapa l'objet maudit puis se détourna de l'attraction du vide. En quittant les lieux, Anamaya avisa un mot sur la table, comme laissé à son intention. Les sourcils froncés elle y jeta un œil. C'était une mise en garde...

L'aéride regarda autour d'elle, se demandant qui avait pu déposer ce papier après qu'elle ait choisi de ne pas détruire le livre. Mais il y avait personne. Mais ce n'est pas parce qu'on ne voit rien, que rien n'existe. Après tout, le nécromancien avait une cape d'invisibilité plutôt efficace...

Le cœur frappant fort contre sa poitrine, elle glissa le livre dans sa sacoche et pressa le pas.
Elle se sentait mal à l'aise de le détenir ainsi, mais elle était persuadée que ce n'était pas le fruit du hasard. Il y a une raison à toute chose.

Et les signes avaient déjà indiqué qu'une voie plus sombre serait offerte. C'était écrit.

Il fallait qu'elle aille le mettre à l'abri.
Avec l'Autre.
Ensuite...
Il faudrait trouver de quoi les nourrir.